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Thursday, April 23, 2020

A propos de la mode : Pourquoi parle-t-on de "fashion victim" ?

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« Sous leur apparente légèreté, les tendances ne se limitent pas à des phénomènes frivoles et marchands. Les plus réfléchis de nos actes peuvent eux aussi être régis par des modes. »

Sur la base de cet extrait de Guillaume Erner, dans Sociologie des tendances (2008), on peut effectivement se poser la question qui suit : En quoi la mode influe-t-elle sur les relations humaines ? En vue d’y répondre, nous allons voir dans un premier temps en quoi la mode constitue un instrument du changement, puis, son rôle comme marqueur de distinction sociale et enfin observer son pouvoir immense puisqu’il parvient à contraindre l’Homme. Aussi, nous nous appuierons sur le corpus documentaire suivant pour illustrer notre étude, à savoir : les Lettres persanes de Montesquieu (1721), les Petites œuvres morales de Giacomo Leopardi (1824) et la Sociologie des tendances de Guillaume Erner (2008).  


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La perception de la mode tel un instrument du changement est rappelée par l’évolution des tenues vestimentaires difficile à anticiper chez les Français comme l’a écrit Montesquieu dans les Lettres persanes (1721) : « Je trouve les caprices de la mode, chez les Français, étonnants. Ils ont oublié comment ils étaient habillés cet été ; ils ignorent encore plus comment ils le seront cet hiver. » Toutefois, cela ne se limite pas à un domaine spécifique puisque même les coiffures, les chaussures ou encore les choix effectués dans la filière de la construction évoluent constamment. Là aussi, on peut en prendre pour preuve la mode présentée comme un personnage d’un dialogue par Giacomo Leopardi dans les Petites œuvres morales (1824) et qui s’exprimerait ainsi : « je me suis contentée de toucher aux barbes, aux cheveux, aux habits, au mobilier, à l’architecture et j’en passe. »  Quant à Montesquieu, dans ses Lettres persanes (1721), il en parle en ce sens : « Quelquefois, les coiffures montent insensiblement, et une révolution les fait descendre tout à coup. »
La mode évolue même plus vite que les générations qui se succèdent. Au cours de sa vie, une seule et même personne vit elle-même plusieurs variations de la mode. En cela, le dialogue écrit par Giacomo Leopardi est éloquent :       
«La Mode. – Madame la Mort, Madame la Mort            !
La Mort. – Attends que ce soit l’heure ; je viendrai sans que tu m’appelles. » 

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Un aspect propre à la mode est également son utilisation comme un marqueur de distinction sociale. Ainsi, on peut remarquer à travers elle le clivage entre la capitale et la campagne : « Une femme qui quitte Paris pour aller passer six mois à la campagne en revient aussi antique que si elle s’y était oubliée trente ans. » (Montesquieu dans les Lettres persanes, 1721) Toujours, d’après Montesquieu dans les Lettres persanes, elle fait apparaître de façon remarquable les différences de génération : « Dans cette changeante nation, quoi qu’en disent les mauvais plaisants, les filles se trouvent autrement faites que leurs mères. »      
En outre, la mode est perçue parfois comme un objet permettant de perpétuer une sorte de lutte entre les classes sociales. Guillaume Erner dans Sociologie des tendances (2008) en fait allusion : « l’objet tant désiré hier, le must have, devient le comble du démodé ; le signe distinctif, objet de toutes les convoitises, se mue en stigmate. »

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Suivie pas-à-pas, la mode semble exercer une véritable contrainte sur l’Homme. D’ailleurs, certains auteurs, à l’instar de Guillaume Erner dans Sociologie des tendances (2008) l’illustre bien en faisant remarquer que tous les domaines de la vie sont tenus de s’adapter aux aléas de la mode : « Les tendances nous accompagnent désormais dans chacun des domaines de notre existence. De la maison aux vacances, en passant par la gastronomie ou les danses : chaque domaine connaît ce télescopage entre les choix individuels et les goûts collectifs. Tout se passe comme si les désirs du grand nombre étaient désormais régis par une autorité aussi puissante que capricieuse : la mode. » Au fil du temps, elle transforme le peuple tout entier à la manière de l’influence d’un monarque sur ses sujets. Après tout, « Il en est des manières et de la façon de vivre comme des modes ; les Français changent de mœurs selon l’âge de leur roi. Le monarque pourrait même parvenir à rendre la nation grave, s’il l’avait entrepris. » (Montesquieu, les Lettres persanes, 1721)  En somme, il est intéressant d’observer que cette pression s’exerce sur toutes les couches sociales même la classe sociale la plus haute. Pour preuve, référons nous au dialogue entre La Mort et La Mode imaginé par Giacomo Leopardi dans Petites œuvres morales (1824) « Plus généralement, je contrains les gens les plus raffinés à endurer tous les jours mille fatigues et mille désagréments ».

Au terme de cette étude, on constate les effets de la mode sur divers aspects de la société : les goûts vestimentaires, l’immobilier ou encore dans les choix des prénoms. Le rôle joué par elle tend à favoriser le changement à une vitesse effrénée, à exacerber le souci de la distinction sociale mais aussi à exercer une pression très élevée en vue de soumettre chaque individu à ses codes. Toutefois, on peut se poser la question de savoir si celle-ci répond à des codes établis par une frange réduite de la société comme le suggère Montesquieu dans les Lettres persanes (1721) : « Le Prince imprime le caractère de son esprit à la Cour ; la Cour, à la Ville : la Ville, aux provinces. L’âme du souverain est un moule qui donne la forme à toutes les autres. »


Conçu et écrit par David IBRAHIM.

Ouvrage de référence sur le sujet : 





Sources
Montesquieu, Lettres persanes, lettre 99, 1721
Giacomo Leopardi, Petites oeuvres morales, "Dialogue de la Mode et de la Mort", 1824
Guillaume Erner, Sociologie des tendances, PUF, 2008

1 comment:

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